En théorie, chacun peut transmettre son patrimoine au bénéficiaire de son choix, sauf s'il a des enfants. Mais peut-on léguer à qui on veut en pratique ? La loi française encadre strictement la transmission en réservant une part aux héritiers légaux. Alors comment léguer sa maison ou appartement à un parent éloigné, un ami, un proche ou toute autre personne hors du cercle familial ?
Comment léguer une maison de son vivant ?
Il est possible de transmettre son logement à la personne de son choix, à condition de ne pas empiéter sur la réserve des héritiers directs. Cela soulève la question de comment léguer une maison de son vivant ou léguer un bien immobilier par testament.
Faire une donation de son vivant est une option pour transmettre son patrimoine tout en optimisant la fiscalité. On peut par exemple donner sa maison de son vivant à un ami ou à un proche, même sans lien de parenté, en respectant les règles légales. Il existe différents types de donation, comme la donation-partage ou la donation en nue-propriété où le donateur conserve l'usufruit du bien jusqu'à son décès.
Transmettre un bien immobilier à un tiers : que dit la loi ?
En matière de succession, le droit français est très protecteur à l’égard des enfants du défunt. Depuis la réforme successorale du 1er septembre 2018, seuls les descendants et, à défaut, le conjoint, ont le statut d'héritiers « réservataires ». La part du patrimoine qui leur est réservée, appelée réserve héréditaire, ne peut être ni diminuée ni altérée.
La réserve héréditaire ne constituant qu’une partie du patrimoine, l’autre partie, nommée quotité disponible, peut être transmise librement à qui bon semble, à condition de ne pas rogner sur la part des réservataires.
Si la « réserve » héréditaire des ayants droit n’est pas respectée, ces derniers sont en droit d’intenter une action en réduction pour remettre en cause le legs ou la donation et récupérer leur quote-part.
Les différentes formes de testament
Pour léguer un bien immobilier par testament, il est essentiel de choisir parmi les différents types de testaments reconnus par la loi française :
- Testament olographe : écrit entièrement à la main par le testateur.
- Testament authentique : rédigé par un notaire en présence de deux témoins.
- Testament mystique : remis clos et scellé au notaire.
Chaque forme a ses spécificités et peut être choisie en fonction des besoins du testateur. Les frais de notaire associés peuvent varier selon la complexité de la succession.
Léguer un bien post-mortem par voie testamentaire
Dans le cas d'une transmission post-mortem d’un bien immobilier, le legs doit obligatoirement faire l’objet d’un testament devant notaire. Plusieurs cas de figure existent selon les modalités de transmission et la situation personnelle :
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En présence d’héritiers réservataires : Si vous souhaitez léguer votre maison à un tiers et que vous avez des enfants, il faut veiller à ne pas empiéter sur leur réserve. Il est important d’évaluer si le bien entre dans la « quotité disponible » de votre succession pour ne pas désavantager vos héritiers légaux.
Peut-on donner sa part de maison à son conjoint ? Oui, il est possible de transmettre une maison à son conjoint par donation ou testament, en respectant la réserve héréditaire des enfants.
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En l’absence de descendants : Une part légale—correspondant à un quart de votre patrimoine—revient au conjoint survivant. Libre à vous de léguer un bien immobilier à un tiers, en respectant la quotité disponible.
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Célibataire et sans enfants : Vous pouvez transmettre votre patrimoine à un parent éloigné ou à un proche sans lien de parenté. Toutefois, dans le cas d'une donation d'un bien immobilier sans lien de parenté, les droits de donation peuvent être élevés.
Si la réserve héréditaire n’est pas respectée, les héritiers peuvent intenter une action en réduction pour récupérer leur quote-part. Il est donc recommandé de faire appel à un notaire pour s'assurer du respect des règles et mettre à jour vos dispositions testamentaires.
Une imposition dissuasive pour le légataire non-héritier
Au-delà des règles intangibles, la transmission par legs d’un bien immobilier est assortie de diverses contraintes. À commencer par des droits de succession particulièrement élevés, qui peuvent représenter un lourd tribut pour le bénéficiaire et dont les montants sont calculés sur la base de la valeur du bien immobilier et selon le degré de filiation :
- 35 à 45 % d’imposition pour les frères et sœurs, après abattement forfaitaire de 15 932 € sur la part de chaque bénéficiaire.
- 55 % pour une donation au profit des neveux ou nièces, cousins germains.., après abattement fixé à 7 967 €. Ce même taux s’applique pour tout légataire d’une parenté allant jusqu’au 4e degré avec un abattement de 1 594 €.
- 60 % de droits de succession pour les bénéficiaires au-delà du 4e degré et toute personne au dehors du cercle familial ou sans lien juridique avec le donateur (concubin, belle-famille, ami...), après un abattement de 1 594 €.
Ces taux peuvent dissuader le bénéficiaire d'accepter le legs. Parfois, il peut être plus avantageux de acheter une maison pour quelqu'un plutôt que de la lui léguer, afin de réduire les droits de succession.
Tout bénéficiaire d’un legs est en droit d’y renoncer sans autres justifications, ce qui peut être le cas, par exemple, pour un héritier non réservataire, pour qui les droits de succession s'avèrent prohibitifs.
La donation de son vivant pour alléger la note fiscale
Les taux d’impositions étant très lourds pour le légataire, a fortiori en absence de liens de parentés, des options permettent d'optimiser une succession. Parmi les plus avantageuses, la donation en démembrement ou de nue-propriété. Ce mécanisme, qui permet d’anticiper une succession tout en réduisant le montant des droits à payer à l’administration fiscale, présente plusieurs avantages :
- Le donateur transmet de son vivant, via un acte notarié, une habitation à la personne de son choix et dans la limite de la quotité disponible s’il a des descendants, mais en conserve la jouissance et l’usage jusqu’à son décès.
- A partir de là, le bénéficiaire, dit « donataire », récupère la pleine propriété du bien sans avoir à s’acquitter d'autres de droits de succession, la nue-propriété et l’usufruit reconstitués étant nets d’impôts.
- Les droits de donation sont uniquement calculés sur la valeur de la nue-propriété du bien, et non pas sur la valeur plus élevée du logement, ni sur sa plus-value dans le temps.
- Le taux d’abattement sur la nue-propriété est calculé selon l’âge du donateur ou usufruitier au moment du démembrement de propriété, et puis celui-ci est jeune, plus l’assiette de droits à payer est réduite : 50% de la valeur de la nue-propriété après 50 ans, 60% si le donateur a entre 61 et 70, et 10% de plus à chaque décennie.
- Au décès du donateur, le bénéficiaire récupère la pleine propriété sans droits de succession supplémentaires, ceux-ci ayant été calculés lors du démembrement. Le donateur peut prendre en charge les droits de donation, sans autres taxes applicables.
Léguer à une association caritative
Il est possible de léguer son patrimoine immobilier à une association caritative via un legs particulier si la transmission porte sur un bien d’habitation précis. Si l’association bénéficiaire est reconnue d’utilité publique (article 795 du Code général des impôts), elle n’aura pas à s’acquitter de droits de succession.
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